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Ça n’est pas le moment de lâcher nos paysans bio !

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Voilà plusieurs semaines que l’agriculture ou les produits bio reçoivent des attaques relayées massivement sur les médias et les réseaux sociaux. Ces attaques initiées par la baisse de la consommation en bio ont de quoi nous faire perdre nos repères, oublier les principes fondateurs et les effets positifs de la bio. Pourtant, l’agriculture et l’alimentation bio font partie des solutions face à la crise climatique et au déclin du vivant ! Ça tombe bien car depuis 2009, avec notre livret « La bio en questions », nous abordons les 20 questions les plus fréquentes qu’on peut se poser sur la bio. Faisons le point sur les questions du moment et abordons la situation, sous le prisme de l’accessibilité pour toutes et tous.

Ce n’est pas le moment de lâcher les producteur.trices bio !

La consommation bio en baisse ?

Pour la première fois de son histoire, les ventes de produits bio stagnent. Le contexte inflationniste et les risques de pénurie peuvent expliquer pour partie un retour vers les produits classiques. Pourtant, les prix de la bio ne flambent pas et sont moins directement touchés par les tensions sur les engrais et hydrocarbures, et donc par la situation géopolitique mondiale. Pour autant, l’absence de politiques en faveur de l’agriculture biologique, dans un contexte de flambée généralisée des prix de l’énergie et des produits alimentaires, couplée à la stagnation des salaires, rend d’autant plus complexe l’accessibilité des produits bio.

Bio Consom’acteurs milite pour une bio pour toutes et tous rendue accessible, sans que les paysans et les paysannes ne voient leurs revenus encore diminuer. Outre le changement de nos habitudes alimentaires et les réductions des marges des intermédiaires, des solutions politiques pourraient être immédiatement mises en place

Selon Charles Pernin, délégué général du Synabio, le syndicat des entreprises bio : « le choc inflationniste inédit que nous vivons modifie les tendances de fond qui étaient là depuis 15 ans. Pour moi, il s’agit d’un palier de croissance lié à ce choc externe. Les limites de notre système agricole et alimentaire restent toujours le sujet de fond de notre époque. La bio va continuer à se développer car elle est en avance et elle résonne avec les défis du moment (transition écologique, souveraineté et indépendance, besoin d’une alimentation plus saine). Il faut donc miser sur les acquis de l’agriculture biologique pour transformer le système alimentaire et agricole (…) La bio est aujourd’hui la solution la plus aboutie pour la transition agricole et alimentaire. »

Soutenons nos paysannes et paysans bio !

Nous connaissons une crise climatique et sociale inédite. La biodiversité s’effondre, nos eaux sont polluées, nos sols sont abîmés et le modèle agricole dominant ne remet pas en cause ses pratiques alors que les effets sur la santé humaine et son environnement ne sont plus à démontrer. Les surfaces agricoles diminuent et le nombre d’agriculteurs et d’agricultrices décline et va connaître une chute radicale avec le départ à la retraite d’une génération qui ne sera pas remplacée. Génération non remplacée mais dont les terres iront majoritairement à l’agrandissement des plus gros. Dans ce contexte, les consommatrices et les consommateurs peinent majoritairement à terminer le mois, alors que les producteurs et les productrices peinent à vivre de leur métier. Nos paysans et nos paysannes bio sont en première ligne.


Oui à LA bio et non le bio

Revenons aux fondamentaux…

Le recours au déterminant féminin n’est pas seulement une question de grammaire, il permet bien de distinguer deux concepts différents, voire deux camps.

Le bio, terme le plus communément répandu, correspond au marché de l’agriculture biologique, à l’industrie du bio et donc, au mode de production biologique , plus naturel et plus respectueux de l’environnement et de la santé que le conventionnel. Et puisqu’il fait référence à l’agro-industrie, il est régi par un règlement. Chaque agriculteur.trice qui désire obtenir le label bio doit donc répondre à un cahier des charges précis.

« La bio » de son côté, fait écho aux origines de l’agriculture biologique, à sa philosophie.  La bio englobe le respect du vivant, de la vie des sols, de la biodiversité, le respect du travail des agriculteur.trices, la protection de l’environnement, l’importance des goûts au travers des variétés… Ces valeurs sont notamment déclinées dans la charte de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB) que vous pouvez retrouver ici.

Bio ou local ? (retrouvez notre article dédié)

Contrairement à une idée reçue, consommer local au profit du bio ne peut pas se faire dans l’optique de préserver le climat. L’origine géographique n’est en soi que très peu liée à la durabilité écologique de notre alimentation. En effet, selon le Réseau action climat et les données nationales : « 84% des impacts écologiques de notre alimentation résultent de la manière dont les denrées alimentaires sont produites ». Ce chiffre atteint même 90% pour les produits d’origine animale et tombe à 67% pour les produits d’origine végétale. Le transport des produits ne représente ainsi qu’une part marginale de l’impact total de notre alimentation. Il ne représenterait que 5% de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre du système alimentaire mondial.

Si nous consommons local, c’est donc pour d’autres raisons, comme faire marcher l’économie locale ou relocaliser la production, mais ça ne peut pas être avancé comme un argument en faveur du climat, de la biodiversité, de l’eau ou des sols. Faire vivre son territoire en permettant de vendre localement a un impact réel sur l’économie. Une raison supplémentaire pour inciter les producteurs et productrices à s’installer en bio ou à convertir leur exploitation en agriculture biologique.

Pour nous et pour nos partenaires, il ne s’agit pas d’opposer les deux mais de les associer : bio ET local, c’est l’idéal !

Manger bio, est-ce meilleur pour la santé ? (retrouvez cette question page 24 de notre livret ici)

  • Manger bio réduit l’exposition aux substances indésirables et néfastes pour notre santé comme les pesticides, les nitrates, les métaux lourds, les antibiotiques et les hormones. Bio ou un autre label ? Où se situe la bio dans les labels ?
  • Les aliments bio ont une valeur nutritionnelle supérieure, et leur consommation régulière conduit à une nette diminution des risques de cancers, de maladies cardio-vasculaires, du surpoids, de l’obésité, de diabète de type 2 et des maladies allergiques (comme l’a démontré l’étude BioNutrinet Santé).
  • Les consommateurs de produits bio ont par ailleurs un régime alimentaire plus équilibré et varié. Ils choisissent par exemple davantage de céréales à base de farines bises ou complètes, et de légumes secs, riches en nutriments, minéraux et fibres alimentaires. Cela a un impact majeur sur leur bilan nutritionnel. On observe que celles et ceux qui mangent régulièrement bio ont des apports nutritionnels nettement supérieurs. Les adeptes du bio sont également moins enclins à acheter des produits animaux (viande et produits laitiers). A l’inverse, ils consomment deux fois plus de fruits et légumes, de céréales peu raffinées...

 

Quelle réglementation et quels contrôles pour les produits bio ? (retrouvez notre article dédié ici)

L’agriculture biologique repose sur le respect des équilibres naturels, elle exclut ainsi l’usage des produits chimiques de synthèse, des OGM et limite l’emploi d’intrants chimiques de synthèse.

Les produits bio sont contrôlés à toutes les étapes de la filière. Les contrôles sont réalisés par des organismes indépendants, agréés par l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) qui attribuent des certificats garantissant l’origine biologique du produit (dont Ecocert, Agricert, Certipaq,etc).

Les contrôles concernant l’ensemble des opérateurs de la filière bio : producteurs, transformateurs, stockeurs, négociants, importateurs, conditionneurs, distributeurs. Chacun de ces opérateurs fait l’objet d’un contrôle annuel obligatoire, éventuellement complété par des visites inopinées. Un certificat qui liste les produits conformes est remis à l’opérateur à l’issue du contrôle. L’opérateur s’engage à respecter le règlement bio, à accepter contrôles et prélèvements, à signaler tout problème lié à la certification bio et à payer l’organisme certificateur. Le coût des contrôles reste donc à la charge des producteurs.

Les produits bio sont-ils plus chers ? (retrouvez la question page 24 de notre livret ici)

De nombreuses raisons peuvent expliquer pourquoi les produits bio sont souvent plus chers. Non seulement les coûts de production sont plus élevés (plus de main d’œuvre et donc d’emplois, coûts de la labellisation et des contrôles…), mais les intermédiaires de la grande distribution réalisent plus de marge sur les produits bio.

Les produits conventionnels sont en réalité payés trois fois par le consommateur : à l’achat, au travers des charges de santé, et sous forme d'impôts et de taxes servant à dépolluer les eaux et les sols. La FAO (Organisation des nations unies pour l'alimentation) estime même que les coûts environnementaux cachés annuels de la production alimentaire s'élèvent à 2 100 milliards de dollars pour toute la planète. Les coûts sociaux cachés sont estimés à un montant encore plus important : 2 700 milliards de dollars.

Les aides de la politique agricole commune (PAC) ramenées à l’hectare en France sont moins élevées qu’en agriculture conventionnelle. Les produits bio sont donc moins subventionnés.

Consommer bio ne coûte pas forcément plus cher lorsqu’on accepte de modifier ses habitudes en achetant le plus possible directement aux producteurs, en privilégiant les fruits et les légumes de saison, en adoptant une alimentation alternative plus végétale en redécouvrant les légumineuses qui sont d’excellentes sources de protéines.

Des propositions politiques existent : suppression ou baisse de la TVA sur les produits bio, création d’une Sécurité sociale de l’alimentation, revalorisation des aides de la PAC pour les aménités positives de la bio etc… Elles permettraient à chacun de s’alimenter sainement à un prix plus accessible qu’en conventionnel, tout en préservant la planète. Seulement, aucune de ces propositions ne fait visiblement écho chez nos gouvernants et l’opposition des lobbys de l’agro-industrie à ces alternatives est féroce, car cela impliquerait un basculement des modes de production, et donc des profits au bénéfice de toutes et tous.

La bio peut-elle nourrir le monde ? (retrouvez notre article dédié)

A l’heure des risques de pénurie, il est légitime de se poser cette question, d’autant que l’agro-industrie fait pression pour alléger les normes environnementales … Une étude publiée en 2017 dans la revue Nature* montrait qu’une agriculture biologique à 100% est capable de nourrir un monde à 9 milliards d’habitants, à condition d’adopter une alimentation plus végétale et de lutter contre le gaspillage alimentaire.

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Commentaires

Bonjour, Se fournir directement chez le producteur on en rêve tous , encore faut-il en avoir à proximité , personnellement je mange en bio depuis des années mais dire que c’est moins cher que ça peut le devenir c’est pas tout à fait vrai les chaînes de magasins bio qui s’installent de plus en plus n’ont pas tous la même éthique que biocoop ,et les prix des légumes et des fruits sont très élevés . Les 2 biocoop près de chez moi ont fermé pour laisser la place à l’industrie du bio 😢😢 Cordialement

Si vous saviez ce qui se cache derrière Biocoop … vous n’oserez pas parler d’éthique.
Le pouvoir du marketing est exceptionnel :)

Les magasins indépendants bio sont des denrées rares car justement ils ne peuvent pas/veulent pas tordre les agriculteurs (et ne bénéficient pas des bons tarifs des industrielles bio pour les produits transformés qui recherchent des volumes). Au final, ils apparaissent chers face aux grandes chaînes bio (biocoop pour reprendre votre commentaire) … et meurent petits à petits car les consommateurs ne voient que le prix … et les campagnes de pub magnifiquement réalisées par une équipe de citadin (très fort chez biocoop - il faut quand même souligner la qualité de travail).

Le bio a effectivement un coût plus élevé que le conventionnel mais l’écart peut diminuer sensiblement en achetant des produits bruts de saison plutôt que des produits transformés.
Comme on peut le lire entre les lignes de l’article, nous devons changer nos habitudes de consommation pour réduire cet écart …

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