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Loi climat, le compte n'y est pas !

Le 21 juin 2020, les propositions de la Convention citoyenne sur le Climat sont remises au gouvernement. Depuis le 8 mars 2021 et ce pendant 3 semaines, le Projet de loi climat et résilience a été étudié à l’Assemblée nationale. Le projet de loi déposé par le gouvernement est loin d’être à la hauteur de l’urgence écologique. Pourtant, c’était le dernier texte législatif du quinquennat consacré à l’environnement, donc c’est encore une occasion ratée pour le climat.

L’État doit plus que jamais faire ses preuves et tenter de redorer son blason environnemental, après avoir été reconnu coupable d’inaction climatique. En effet, le tribunal administratif de Paris a rendu début février son jugement dans l’Affaire du Siècle : il reconnaît la responsabilité de l'État français dans la crise climatique, juge illégal le non-respect de ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre et le juge responsable de préjudice écologique.

À la question : « Quelle est votre appréciation de la prise en compte par le gouvernement des propositions de la Convention citoyenne ? » les 150 citoyen.ne.s qui étaient en charge desdites propositions lui avaient attribué une note moyenne de 3,3/10. En effet, seuls 12% des propositions faites ont été retenues. L’exécutif était donc attendu au tournant, suite à sa volonté affichée d’atteindre un objectif de 40% de baisse des GES d’ici 2030. Le gouvernement, après s’être renié sur de nombreux sujets et avoir été reconnu coupable d’inaction climatique, a mis de côté, ou considérablement amoindri, les propositions de la convention citoyenne pour le climat (CCC) que cette loi était censée reprendre « sans filtre ».

Pourtant, les abandons sont nombreux : absence d’obligation de proposer des menus végétariens dans les cantines ; artificialisation des sols possible pour des projets commerciaux des moins de 10 000 m2 (soit 80% des projets) ; report de la redevance sur les engrais azotés au projet de loi de finances 2024 ; absence du chèque alimentaire destiné à améliorer l’accès des plus modestes à une nourriture bio et locale ; abandon de l’obligation de rénovation globale des logements dès 2024 (seulement des mesures incitatives) ; suppression des vols domestiques dont le trajet peut être réalisé en train en moins de de 2h30 (et non en moins de 4h dans les propositions de la CCC) ; report de la suppression des avantages fiscaux sur le gazole pour les transports routiers à 2030 ; délit d’écocide ne condamnant que les fautes volontaires et excluant négligence ou imprudence ; absence d’interdiction de la publicité pour les produits les plus polluants (sauf pour les énergies fossiles… mais qui a déjà vu une publicité pour du diesel ?).

« Le compte n’y est pas »

Il est aussi important de retenir que le projet de loi en l’état a été jugé insuffisant par les scientifiques du climat qui se sont exprimés sur le sujet, par les experts du Haut Conseil pour le Climat, par le Conseil économique social et environnemental (Cese), et par le Conseil national de la Transition écologique

Le 28 mars dernier, des milliers de citoyen.nes ont marché partout en France pour réclamer « Une vraie loi climat », dénonçant le manque d’ambition avec des slogans comme « les petits pas ne suffisent pas ». Bio consom’acteurs était dans la rue, et nous avons signé l’appel unitaire « Pour une vraie loi climat ».

En tant que membre de Commerce équitable France, nous sommes cependant ravis que l'article 66 du projet de loi "climat et résilience" ait été adopté par la Commission spéciale de l'Assemblée Nationale. L’article 66 représente une avancée incontestable pour le secteur du commerce équitable en ce qu’il reconnaît officiellement le commerce équitable comme un accélérateur de transition écologique et sociale des modes de production et de consommation.

Mais à part cela, comme le résume si bien Mathieu Orphelin, ex-député LREM : « Le compte n’y est pas ».

Le risque est de penser qu’en faisant « seulement » des éco-gestes, la neutralité carbone en 2050 sera atteinte. Il faut aussi changer les modes de production, il faudrait par exemple diviser le flux vidéo par 3 d’ici 2030. 

Les jours qui arrivent jusqu’à la fin de l’étude du projet de loi nous montreront à quel point les député.e.s sont prêt.e.s à s’engager pour le climat, mais même les plus optimistes restent sceptiques quant à l’issue du projet de loi.

Face à gravité de la crise climatique qui nous attend, cette loi n’est de toute façon pas la hauteur :

Sur la trajectoire climatique mondiale. Le climatologue Christophe Cassou vient de faire le point sur le sujet dans un entretien à Reporterre :

« La date de franchissement du seuil de 1,5 °C arrivera certainement dix ans plus tôt que celle qui avait été évaluée dans les précédents rapports du Giec. Ce seuil devrait être franchi au début de la décennie 2030 ».

« Ce seuil de 1,5 °C est quasiment acté. Quelles que soient les mesures prises aujourd’hui, il sera franchi ».

« Le niveau d’engagement actuel des États conduit à un réchauffement global de trois à quatre degrés d’ici 2060-2070 ».

 

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