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La nouvelle politique agricole commune : résumé des derniers épisodes

La nouvelle politique agricole commune : « un désastre social et écologique » (Benoît Biteau, eurodéputé EELV)

Le mois dernier nous vous avons parlé du débat « ImPACtons » en lien avec la réforme de la PAC ; Pour retrouver cet article, c’est ici.

Voici un résumé des derniers épisodes :

Les Européen.ne.s se sont mobilisé.e.s pour faire entendre aux Eurodéputé.e.s leur volonté d’une PAC qui prennent réellement en compte les enjeux environnementaux et sociaux. En France, cela s’est notamment traduit par la tenue de débats publics organisés par la plateforme Pour une autre PAC (dont nous sommes membres) et par une journée de mobilisation nationale « Notre assiette pour demain » le 17 Octobre 2020, co-organisée par le collectif Stop Bayer-Monsanto.

Les ministres de l’agriculture des États membres de l’Union européenne, réunis au sein du Conseil de l’UE, ont trouvé un accord sur la réforme de la PAC le mercredi 21 octobre. Cet accord a été orchestré par l’Allemagne, et plus précisément la ministre allemande de l’agriculture, dans la mesure où c’est le pays qui occupe actuellement la présidence du Conseil. Nos représentant.e.s français.e.s ont voté à 2/3 pour cette réforme, alors que 85% des Français.e.s souhaitent une PAC plus écologique et solidaire (source : pouruneautrepac.eu).

Cette réforme de la PAC est-elle à la hauteur des enjeux environnementaux et sociaux ?

Si les ministres de l’Agriculture des 27 Etats membres se félicitent de cette avancée, beaucoup d’ONG et de militant.es écologistes voient cette proposition de réforme comme un prolongement de l’actuel PAC, avec des petites améliorations par ci par là, mais sans qu’elle soit à la hauteur des défis qui nous attendent. Il n’y a aucune remise en cause du modèle productiviste.
Dans les grandes lignes, les ministres ont adopté une position sur la prochaine PAC qui ressemble beaucoup à la manière dont la PAC agit aujourd’hui. Le Conseil a beaucoup communiqué sur l’ambition environnementale de son accord. Pourtant, son texte ne prévoit rien d’ambitieux, ni sur le plan environnemental, ni sur les autres enjeux.

Au contraire, vu les enjeux colossaux auxquels la prochaine PAC devra répondre, la réforme voulue par le Conseil apparait comme rétrograde et irresponsable :

    • Pas de plafonnement obligatoire des aides (alors qu’au niveau européen, 20% des bénéficiaires captent 80% des aides)


    • Un renforcement des conditions environnementales que doivent respecter les agriculteur·rices pour toucher les aides. Mais avec de nouvelles conditions si basses qu’elles seront sans effet, l’ensemble des agriculteur·rices européen·nes les respectant déjà.


    • Une mesure verte obligatoire pour les États membres (appelée ecoscheme), à laquelle ils devront allouer – avec certaines flexibilités – au moins 20% du budget du 1er pilier, mais sans précision sur son contenu


    • Pas de soutien privilégié pour les petites fermes (qui touchent beaucoup moins d’aides car elles ont peu de surfaces)


    • Pas d’avancée sur le bien-être animal, l’agriculture biologique ni la souveraineté alimentaire

Les propositions les plus ambitieuses restent assez légères :

    • Les éco-régimes sont « une nouvelle source de financement pour atteindre les objectifs en matière d’environnement et de climat » (Commission Européenne)

Dans les faits, cela semble être une bonne nouvelle, cependant, certain.e.s considèrent cette mesure comme insuffisante. En effet, les Etats seront obligés de les mettre en place, mais il n’y aura aucune obligation pour les agriculteur.trice.s. D’autant plus que l’eurodéputé EELV Benoît Biteau, cette « nouvelle » mesure existait déjà depuis 2013…

    • En ce qui concerne l’intégration d’infrastructures agroécologiques comme les haies ou les arbres (primordiales pour la biodiversité), aucune politique globale de refonte du système agricole n’est prévue.

    • Autre point et non pas des moindres : le plafonnement des aides à 100 000 euros par exploitation a été proposé, afin d’éviter un accaparement par des grandes structures, mais encore une fois, ce plafonnement n’est qu’indicatif et dépend de la volonté des Etats membres.

    • Autre déception sur les modalités d’attribution des aides. Les aides sont et resteront attribuées proportionnellement à la surface cultivée, ce qui favorise l’agriculture intensive, et donc la monoculture, l’usage de produits chimiques…   La plateforme Pour une autre PAC proposait une attribution en fonction des emplois créés. Alors que 7,2% de la population active européenne est au chômage (soit environ 15 millions de personnes) (chiffres Eurostat), et que l’agriculture biologique favorise la création d’emplois (+179 500 emplois directs en 2019 en par rapport à 2018 – chiffres du ministère de l’Agriculture).

Et maintenant ?

Le Parlement européen a certes procédé au vote, mais la bataille n’est pas finie !
La proposition de réforme va devoir passer par un trilogue (une réunion des différents organes législatifs de l’UE : Commission Européenne, Conseil de l’UE et Parlement européen). Ainsi, ce n’est que courant 2021 que l’on saura quels sont les règlements européens qui seront mis en place et qui encadreront la nouvelle PAC. Ces trois organes ont chacun une position propre sur la réforme.

Si vous souhaitez participer au débat public organisé via la plateforme Pour une autre PAC , il est encore temps ! Suite à l'annonce du reconfinement, la Commission Nationale du Débat Public a décidé de prolonger le débat public imPACtons jusqu'au 7 novembre 2020 à minuit. Rendez-vous sur la plateforme !

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