dossiers et débats

Ecoscore : point d'étape

CP commun sur l’ECOSCORE 

ABERRANT, L'AFFICHAGE ENVIRONNEMENTAL RISQUE DE PROMOUVOIR L'AGRICULTURE INTENSIVE !

Paris, 17 décembre 2020. La loi relative à la lutte contre le gaspillage prévoit l’entrée en vigueur fin 2021 d’une étiquette environnementale – le futur « Ecoscore » - pour les produits agricoles et alimentaires. Mieux informer les consommateurs sur l’impact environnemental des produits est une excellente initiative. Encore faut-il que la méthode utilisée intègre tous les critères de durabilité !

Or, pour le moment, la méthode envisagée pour servir de base à cet Ecoscore ne prend pas correctement en compte les atteintes à la biodiversité et l’impact des pesticides. En effet, les impacts environnementaux calculés à partir de la base de données agricoles Agribalyse, qui jouera un rôle central dans l’Ecoscore, sont erronés car incomplets. Ils favorisent de manière aberrante l’agriculture intensive.

Qui plus est, cette base de données a été rendue publique prématurément, en dépit des critiques soulevées par de nombreux acteurs associatifs et professionnels.

Nous demandons donc à Barbara Pompili et Julien Denormandie le retrait des données de durabilité inexactes d’Agribalyse et le report du calendrier de l’étiquette environnementale afin que la méthode soit complétée et si besoin repensée. Il y a urgence si l’on veut éviter que certains acteurs de l’agroalimentaire n’utilisent ces données biaisées à des fins de greenwashing !

L'OEUF DE POULE EN CAGE, ÉLU PRODUIT DE L'ANNÉE POUR L'ENVIRONNEMENT ?

La loi prévoit que la future étiquette s’appuie « principalement » sur l’ACV (Analyse du Cycle de Vie), outil conçu pour noter les produits industriels. Or, cet outil calcule les impacts environnementaux en fonction des rendements, à savoir au kg ou au litre de produit fini. L’ACV donne un avantage significatif aux modes de production les plus intensifs. Elle ne tient aucun compte de l’usage de pesticides ou des antibiotiques ni de leurs impacts sur la santé, la qualité des sols, de l’air ou de l’eau. A l’inverse, les bénéfices de l’agriculture biologique ou de l’élevage en plein air sur la biodiversité et le bien-être animal ne sont pas intégrés dans les indicateurs.

Appliqué à l’agriculture, cela signifie que celui qui produit le plus sur la plus petite surface a la meilleure note, quelle que soit la façon dont on produit. « On va laisser croire au consommateur que la ferme des 1000 vaches ou l’élevage de poules en cage c’est ce qui se fait de mieux pour l’environnement ! » explique Agathe Gignoux de CIWF.

« En l’état, cette méthodologie met en avant des systèmes agricoles qui sont à l’opposé de ceux qui sont réellement favorables à l’environnement et que nous souhaitons promouvoir ! Nous sommes prêts à transmettre nos propositions pour transformer Agribalyse en véritable outil de progrès pour l’environnement, la santé des consommateurs et le monde agricole. Nous espérons pouvoir travailler avec les promoteurs du projet pour avancer. » déclare Cécile Claveirole, Secrétaire nationale de France Nature Environnement.

Pour corriger les biais de l’ACV, le futur Ecoscore devra donc intégrer dans les bonnes proportions des indicateurs complémentaires permettant de rendre véritablement compte de la durabilité des pratiques agricoles. Nous serons très vigilants sur la définition de ces indicateurs et souhaitons que la société civile soit beaucoup plus étroitement associée à ces travaux pilotés par l’ADEME.

UNE COMMUNICATION TROMPEUSE POUR LES CONSOMMATEURS !

Il y a urgence à agir car, sans se préoccuper de ces biais, des acteurs de l’agroalimentaire se sont déjà saisis des données d’Agribalyse pour communiquer sur une soi-disant excellence environnementale4. Pire encore, la commande publique s’est déjà emparée de l’outil !

« Tout cela est très préjudiciable à l’information des consommateurs » dit Alain Bazot, Président de l’UFC-Que Choisir.

« Les professionnels de l’agriculture biologique ont bâti au fil du temps une relation de confiance avec les consommateurs sur la base d’un haut niveau d’exigence environnementale. Le projet d’Ecoscore ne doit pas créer la confusion et fragiliser cet acquis. Nous avons besoin de plus de cohérence du côté des politiques publiques sur le contenu et le sens qu’on veut donner à la transition agricole et alimentaire. En l’état, le projet d’Ecoscore brouille les messages de manière très préoccupante. » explique Didier Perréol, Président du Synabio.

ANNEXES : EMPREINTES ENVIRONNEMENTALES SELON AGRIBALYSE 3.0

Cette annexe présente les empreintes environnementales issues de la partie agricole de la base de données Agribalyse 3.0 pour cinq produits avec ou sans signe de qualité : les œufs, le poulet, le blé, les pommes et le lait. Ce sont les données d’Agribalyse 3.0 qui sont pressenties pour servir de base à la future étiquette environnementale. Plus le score est élevé, plus le produit est considéré mauvais pour l’environnement.

L’empreinte environnementale est mesurée par un score, valeur sans unité, qui agrège un ensemble d’indicateurs (empreinte carbone, ozone, acidification du milieu, eutrophisation...). Plus ce score est élevé et plus l’impact est considéré comme néfaste pour l’environnement.

Globalement on observe que les produits sous signes de qualité et/ou issus de modes de production extensifs sont moins bien notés que les produis issus de l’agriculture conventionnelle et des élevages intensifs.

Dans le cas du poulet, la différence s’explique notamment par une durée de vie plus longue des animaux (en bio et en label rouge), et donc une quantité d’intrants (notamment alimentation des animaux) plus importante pour la production d’un kg de viande.

Dans le cas de la pomme et du blé, les résultats s’expliquent par le rendement maximum, qui n’est accessible que par les méthodes conventionnelles intensives (pesticides, azote minéral...) et sur des territoires offrant les potentiels de rendement correspondants.

Dans le cas du lait, pour avoir un bon score, les vaches laitières ne doivent pas être au pâturage mais en bâtiment et nourries avec plus de 30% d’ensilage de maïs.

Précisions concernant les scores et les moyennes

Il existe plusieurs méthodes permettant de calculer l’empreinte environnementale d’un produit à partir des données d’Agribalyse 3.0

La méthode EF2t agrège les 16 indicateurs d’impact ACV, dont la toxicité. Elle a été remplacée par EF3, une version plus récente également basée sur les 16 indicateurs, mais qui n’est pas encore communiquée pour tous les produits.

Pour réaliser les graphes ci-dessus, nous avons utilisé les empreintes communiquées par l’Ademe par type de production (EF3), ou calculé ces empreintes à partir des données disponibles dans la base agricole d’Agribalyse 3.0 (EF2t). Nous avons calculé des moyennes issues des scores EF2t ou EF3.

Contact presse

Joanna Trouchaud, chargée de communication SYNABIO – 06 35 21 02 10 joannatrouchaud@synabio.com

Agriculture

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