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# Portraits de consom'acteurs : Christel et la (grosse) pêche


Christel est bénévole pour Bio Consom'acteurs. Enfant difficile à table, elle découvrira le bonheur de manger grâce à la bio. Découvrez une consom'actrice engagée qui n'aime rien moins que faire du vélo, lire et...cuisiner.


Comment es-tu tombée dans la marmite de la consommation responsable ?


J'étais sensible depuis longtemps à la question des déchets : je faisais le tri, limitais mon utilisation de sacs plastique… Et puis j'ai rencontré une collègue de la crèche où je travaillais à Saint-Denis. Elle me parlait beaucoup du bio, du principe des Amaps et autres ventes par paniers. En 2009 j'ai décidé de tester le Campanier, pour voir.


Et ce panier de légumes a remué des choses en toi...

Oh oui ! Quand j'ai découvert le Campanier, j'ai aussi découvert la diversité du monde végétal. Ce qui était nouveau pour moi, c'est que je payais pour des légumes et fruits que je n'avais pas choisis et que j'étais donc obligée de manger. C'est grâce à ça que j'ai fait la connaissance des courges, du fenouil, des pêches, des nectarines, des abricots... Et c'était finalement assez simple de les préparer, car on nous proposait des recettes dans le panier. 


Tu ne connaissais ni les courges ni les pêches ?!

Disons que je mangeais toujours la même chose, c'est-à-dire très peu de fruits et légumes frais. C'est une habitude que j'avais prise depuis petite, car j'étais difficile. En même temps, personne ne m'a jamais forcée à manger quand je n'avais pas envie ! Dans notre famille de quatre enfants, si on était quatre à aimer des choses différentes, ma mère préparait quatre plats différents ! J'étais une abonnée aux gâteaux industriels, aux légumes surgelés ou en conserve. J'ai donc grandi avec une alimentation très monotone... Au point de choisir toujours la même marque de yaourts une fois adulte ! Le Campanier fut une ouverture.


C'est donc d'abord ta quête de diversité qui t'a donné envie de t'intéresser à la bio ?

Oui. Pour te donner un exemple, je suis entrée pour la première fois dans un magasin bio, j'ai eu l'impression d'être dans la caverne d'Ali Baba ! Moi l'enfant difficile, j'ai eu envie de goûter à tout ! Ce n'était pas l'environnement ni la santé qui me motivaient mais la découverte du nouveau, du différent. J'étais avant tout animée par l'idée de manger autrement, de sortir de l'uniformité, découvrir des aliments et des cuisines qui sortaient de l'ordinaire. En voyant tout ce que les magasins bio proposaient, je me suis  mise à fouiller sur Internet. Et je suis tombée sur le blog de Valérie Cupillard : en termes d'originalité, j'étais gâtée ! Alors que j'étais sceptique, voire un peu dégoûtée à l'idée de boire du lait de soja, eh bien j'ai testé des recettes et appris très vite à l'aimer. Quand je pense qu'avant, je triais tous les fruits secs du couscous...

Tu as fait d'autres découvertes à partir de là ?

Chez Biocoop, j'ai découvert les saisons – ce qui n'a pas été le cas chez Naturalia par exemple. J'ai aussi développé mon côté militant. C'est chez Biocoop que j'ai appris que choisir des aliments importés par bateau, et non par avion, permettait de limiter l'impact environnemental du transport. J'y ai aussi appris que les kiwis poussaient en France, alors que jusqu'à présent, je n'avais aucun problème avec les kiwis de Nouvelle-Zélande ! Je me suis donc mise à choisir des aliments non seulement de saison, mais aussi les plus locaux possibles. Une des meilleures découvertes que j'ai faites en Biocoop, c'était le vrac. J'ai enfin pu acheter de petites quantités de céréales, graines, biscuits, etc., en fonction de mes besoins, et limiter ainsi mes dépenses, au lieu d'acheter des gros paquets que j'allais mettre des mois à utiliser.


Beaucoup de gens pensent qu'il faut être riche pour manger bio...

Je ne pense pas qu'il faille être riche, mais je pense qu'il faut revoir ses priorités. Il ne faut pas se leurrer : si on continue à manger exactement comme avant, le budget alimentaire augmentera forcément. Pour ma part je me considère comme étant de la classe moyenne. Comme je n'ai pas envie de mettre tout mon argent dans la nourriture, j'ai fait le choix de ne pas avoir de télévision, de ne pas partir en vacances à l'autre bout du monde et de devenir végétarienne, puis végétalienne, notamment pour des raisons financières.


Si je comprends bien, tu es devenue végétarienne en partie pour pouvoir acheter du bio ?

En partie seulement, et c'était de toute façon assez logique. Quand j'ai commencé à manger bio, je me suis vite rendue compte que la viande et le poisson étaient chers. Et comme avec mon compagnon de l'époque, on voulait faire autre chose de notre argent qu'en achat de nourriture, on a commencé à en manger moins souvent, et en plus petites quantités.


Mais au-delà de l'aspect financier, penses-tu que le bio et le fait de manger moins de viande sont liés ?

C'est certain. Pour moi, manger bio est une démarche écologique. Or, quand on connaît l'impact de la viande sur l'environnement – par exemple les quantités phénoménales de végétaux qu'il faut cultiver pour nourrir les animaux  - et de la surpêche,  on se dit que, bio ou pas, on ne peut pas continuer à en manger autant qu'avant ! Quant au bien-être animal, visiblement les abattoirs bio ne sont pas mieux que les conventionnels, vu les vidéos qui circulent dans les médias…Pour être cohérent, je pense que manger bio implique de diminuer sa consommation de viande, voire de devenir végétarien ou, mieux, végétalien. Tout le monde y gagnerait : la planète, les animaux, notre portefeuille et notre santé ! D'ailleurs, j'aime bien dire aux gens que depuis que je suis végétalienne, je n'ai plus de carences  alors que c'était le cas quand j'étais omnivore. C'est sûrement dû au fait que je m'intéresse davantage à la nutrition et que je fais attention à manger diversifié.

 


L'idée de manger moins de produits animaux résonne comme le glas pour beaucoup de Français… Comment fais-tu pour t'en passer, toi qui adores manger et cuisiner ?

 

C'est simple : je me suis subitement rendue compte de l'extraordinaire richesse du monde végétal ! Et encore une fois grâce aux magasins bio. J'ai découvert le quinoa, le kamut, les courges...des aliments que je ne voyais pas chez les primeurs... et encore moins dans les supermarchés, où l'on nous vend deux ou trois variétés de pommes, alors qu'il en existe plus d'une centaine ! Je trouve ça dommage : on formate l'individu à quelques produits, au lieu de l'ouvrir à la diversité. Or, c'est grâce à cette infinité de végétaux que l'on peut envisager de se passer de viande et de poisson.
Ce serait bien que tout le monde connaisse ces alternatives afin de faire leurs choix en conscience.
Et pas qu'elles soient réservées à ceux qui savent, ou qui s'y intéressent déjà. On est pas tous nés écolos responsables, ni végétariens.


As-tu des conseils pour manger bio sans mettre tout son argent dans la nourriture ?

Déjà, cuisiner permet de revoir les coûts. Inutile pour autant de se mettre aux fourneaux tous les jours ! Quelques heures, deux à trois fois par semaine, suffisent : il faut juste préparer des quantités pour plusieurs repas. Par exemple, il m'arrive de cuisiner tout un dimanche matin, mais je ne cuisinerai plus jusqu'au mercredi suivant.
J'ai aussi envie de dire qu'il faut apprendre à faire avec ce qu'on a devant soi, qu'on a l'habitude de jeter, comme les fanes (de carotte, radis, fenouil, etc.). Ce n'est pas du tout de la cuisine de fin de mois : au contraire, c'est souvent savoureux.
Un autre truc pour dépenser moins : je pars toujours avec une liste de courses et prévois tous mes repas de la semaine à l'avance. Ca permet de ne pas dévaliser le magasin !
J'ai aussi appris à ne plus gâcher : quand il y en a trop, je congèle. Et parfois, je me compose un repas uniquement avec des restes, ce qui change de l'ordinaire !


Une recette favorite ?

Une recette que j'aime bien : la bolognaise végétalienne ! [NDLR : la recette bientôt sur notre site!]


Au-delà de la nourriture, que fais-tu pour consommer responsable ?

Je fais depuis longtemps le tri des déchets et utilise très peu de sacs et d'objets en plastique jetables. D'ailleurs, quand j'allais au Campanier, je râlais déjà contre le suremballage ! Mais surtout, je suis passée d'une consommation effrenée d'objets à une certaine sobriété. Notamment pour les habits: avant, un vêtement me durait un an,  j'en rachetais à chaque solde et il m'en fallait toujours de nouveaux. Maintenant, j'achète seulement quand j'ai besoin. Je me dis qu'on peut vivre sans 15 pantalons ou 20 robes ! Et j'estime que du moment qu'on se sent bien dedans, il y a des choses plus importantes qu'avoir une tonne de fringues. Je fabrique aussi mes propres produits d'entretien, grâce au super livre de Béa Johnson, "Zéro déchet" et au blog génial "Famille zéro déchet".
Depuis cet été, j'essaie de faire pousser des légumes (tomates et menthe) sur mon balcon...Je ne sais pas si ça va marcher cette année !
A part ça, je milite dans des associations – Bio Consom'acteurs et Saveurs durables notamment -, j'anime des ateliers de cuisine pour des enfants, je fais goûter des plats vegans et bio à mes collègues de travail, etc.


As-tu des passions ?

Beaucoup : aller au cinéma, faire du vélo, voir des concerts...Mais surtout, j'adore les livres, surtout ceux pour les enfants. Je crois que c'est la base de tout. Dans mon travail, je me suis occupée de beaucoup d'enfants, issus de milieux très différents, aisées comme précaires dans les cités de Seine-Saint-Denis. Je pense que les livres sont particulièrement précieux pour ces enfants-là. Ils aident à développer l'imaginaire, le vocabulaire, les connaissances, mais aussi à échanger avec l'autre, à s'ouvrir… A l'avenir, j'aimerais beaucoup me rapprocher d'un bus itinérant qui fasse bibliothèque pour les enfants des quartiers défavorisés.
 

Crédit photos (sauf la dernière) : Bio Consom'acteurs

Propos recueillis par Diana Semaska

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