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Soutenir l’agriculture française d'aujourd'hui ou celle de demain?

En pleine crise agricole, le gouvernement demande aux préfets de mettre en œuvre une politique d’achat local pour les cantines. Pour Bio Consom'acteurs, c'est un premier pas, mais bien loin de suffire à extraire l’agriculture française de la lie dans laquelle elle s'est embourbée.

Le patron de la FNSEA réclame 3 milliards d’euros pour industrialiser encore plus l’élevage. Ce n’est pourtant pas en le mettant sous perfusion que le monde agricole ira mieux. Bien sûr, donner de l’argent, ou de l’aide aux collectivités pour que les cantines puissent s’approvisionner localement, comme le demande l’Association des maires de France, c’est bien. Certaines collectivités comme Saint Etienne sont d’ailleurs déjà bien en avance, puisqu’elles favorisent à la fois la bio et le local. Mais c’est tout le modèle agricole qu’il faudrait revoir.

Franchement : veut-on réellement sauver l’élevage de porcs en batterie, dont les déjections bourrées de nitrates viennent grossir d’algues vertes les cours d'eau bretons déjà agonisants ? Doit-on soutenir un élevage totalement dépendant de l’importation massive de soja américain, en majorité génétiquement modifié et cultivé sur des parcelles déforestées? Souhaite-t-on entretenir un élevage laitier dont l’un des objectifs est d’exporter de la poudre de lait à bas prix en Chine, en concurrence avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande? A-t-on envie de donner un coup de pouce aux gentils businessmen qui entassent les vaches dans des hangars telles des automobiles prêtes à êtres démontées? Non.

L’agriculture française sera sauvée lorsqu’elle sera soutenable pour les agriculteurs ET pour l’environnement. Chez Bio Consom’acteurs, ce que l’on souhaiterait, même si on se répète, c'est que l’Etat aide nos agriculteurs dans leur transition vers l’agroécologie. C’est-à-dire à être un peu plus autonomes. Que ce soit en semences, en intrants, en énergie. Et donc, à moins dépendre de la grande distribution, des vendeurs d’engrais et de pesticides. Des primes pour planter des haies, des arbres dans les champs, pour laisser des prairies et des jachères fleuries. Des subventions pour encourager la production de légumineuses, qui serviront à nourrir les bêtes. Des incitations pour remettre les animaux au pré et oublier ces ignobles fermes-usines que semblent défendre Xavier Beulin et consorts. A passer en agriculture biologique, tout simplement. L’agriculture biologique mise d’abord sur la qualité et emploie quasiment deux fois plus de personnes que l’agriculture conventionnelle.

Cerise sur le gâteau, ils y a de plus en plus de Français chaque année qui mangent bio. On peut donc espérer logiquement qu'il y ait de plus en plus de gens qui acceptent de payer un peu plus cher des produits de meilleure qualité, non issus d'une agriculture productiviste. Voilà qui est prometteur pour sauver un secteur, n’est-ce-pas ? Alors oui, aidons les agriculteurs d'aujourd'hui à construire l'agriculture de demain. Comme d'habitude, Etat, agriculteurs et consommateurs ont tous trois leurs responsabilités là-dedans. Mais une chose est sûre. Soutenir l’agriculture française, ce n’est pas la faire accélérer devant le mur comme le propose M. Beulin. C’est l’aider à le contourner.

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