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Des insecticides retardent le développement cognitif chez l'enfant

Chrysanthèmes _ credit photo toshiyuki IMAI

Pas une année sans que de nouvelles découvertes inquiétantes sur l'impact sanitaire des pesticides ne paraissent. Ici, c'est une étude de l'Inserm qui démontre le rôle des insecticides pyréthrinoïdes dans les retards cognitifs chez l'enfant.

Les pesticides présents notamment dans les anti-poux, anti-moustiques et autres traitements vétérinaires anti-insectes seraient toxiques pour le développement cognitif des enfants. Dit comme ça, cela peut paraître trivial, mais une étude parue dans Environmental International le prouve scientifiquement. Des chercheurs de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et des psychologues de l'université de Rennes y montrent le lien entre l'exposition aux insecticides pyréthrinoïdes et une baisse significative des performances cognitives de l'enfant. Or, "les conséquences d'un déficit cognitif de l'enfant sur ses capacités d'apprentissage et son développement social constituent un handicap pour l'individu et la société. Les efforts de recherche doivent se poursuivre afin d'identifier des causes qui puissent faire l'objet de mesures de prévention", selon Jean-François Viel, co-auteur de ces travaux, d'après le site de l'Inserm.

Pour réaliser leur étude, les chercheurs ont fait appel à 287 femmes sélectionnées au hasard au sein d'une cohorte de 3500 couples mères-enfants, lesquels sont suivis depuis 2002 sur le plan de l'exposition aux insecticides pyréthrinoïdes, pendant la vie foetale et pendant l'enfance. Des psychologues ont évalué le développement cognitif des enfants, âgés de 6 ans, grâce à des tests de compréhension verbale et de mémoire, caractérisé l'environnement familial et recueilli des échantillons d'urine et de poussière.

Les insecticides pyréthrinoïdes sont largement employés en agriculture, en usage vétérinaire et en usage domestique (anti-poux, anti-moustique, anti-mites, etc.). On a commencé à les utiliser dans les années 1970, comme alternatives moins polluantes aux organochlorés et organophosphorés, dont on commençait à dénoncer la toxicité environnementale. On ne connaissait alors pas de preuve de la  neurotoxicité des pyréthrinoïdes chez l'homme. Sur son site internet, l'Inserm explique que les enfants seraient particulièrement fréquemment exposés à ces substances, du fait des shampoings anti-poux, de leur plus grande proximité avec les poussières du sol (qui stockent les polluants) et des contacts main-bouche plus fréquents.

A noter: si en bio, les pyréthrinoïdes, qui sont des insecticides de synthèse, sont interdits, les pyrèthres, leur équivalent naturel, sont eux bel et bien autorisés. Or, s'ils sont a priori biodégradables, rien ne permet d'affirmer que les pyrèthres ne sont pas neurotoxiques pour les humains, à l'instar des pyréthrinoïdes: ils restent des poisons conçus pour bloquer le circuit nerveux chez les insectes - et qui impacte d'ailleurs les autres ectothermes, à savoir les poissons, reptiles et amphibiens - et leur impact sur la faune (dont les auxiliaires) est réel. Par ailleurs, quid de l'utilisation habituelle d'insecticide, même naturel? N'est-ce pas une façon d'éviter de se questionner sur la cause de l'invasion, et de se débarrasser facilement des gêneurs sans sortir de la dichotomie utile-nuisible?

 

Crédit photo: toshiyuki IMAI

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